La femme à venir

 âge, parole

" C'est un  homme de cinquante- trois ans. Dans les yeux d'Albe, il en a à peine trente. c'est la voix qui donne l'âge vrai. C'est la flamme d'une parole qui renseigne le mieux sur l'âge des gens."

visage, lumière, peintre

" Ce n'est pas elle qu'il regarde. C'est l'autre, la morte. La mère. Le visage d'Albe était comme une neige. La neige a fondu en une nuit. On peut voir l'herbe du second visage, celui de la femme adultère. Comment expliquer. Il n' y a qu'un peintre pour remarquer cette soudaine catastrophe des lumières, ce glissement imprévu de visage. Il s'approche d'elle. Il prend sa tartine et en mange un bout. Il sourit et lui donne une gifle, puis une deuxième, très fortes. Maintenant il va se coucher. Elle reste encore un peu dans la cuisine. Ses joues sont brûlantes. Rien de grave. Elle sait très bien que les deux claques n'étaient pas pour elle.Elle sait très bien que, tout à l'heure, ils ne parleront pas de cet orage dans la cuisine. Ce qui est vraiment dit, ce n'est jamais avec des mots que c'est dit. Et on l'entend quand même. Très bien."

" C'est une chose fragile que la lumière du jour. On y grandit. On y marche. on y attend quelque chose, on ne sait trop quoi. Oui, mais voilà : où trouver la force d'attendre, quand le visage aimé est recouvert de terre ? Toute lumière nous venait de ce visage. Maintenant on n'y voit plus."

désordre, essentiel

" Tout est trop bien rangé. trop propre, trop net. Manque la fine harmonie du désordre. Manquent les échos entre la voix d'un enfant, la colère d'une eau qui bout, le pas d'une femme sur la laine rouge d'un tapis. Manque l'essentiel."

conversation, silence

Cette conversation—comme toutes les conversations—est un jeu de société.  Le but est d'amener l'autre au silence.