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Les citations sérieuses du docteur Chabry
Les citations sérieuses du docteur Chabry
  • Orpailleur littéraire, voilà ce que je suis. Les livres sont pour moi des rivières dans lesquelles je cherche des paillettes d'or. Mon trésor à moi ce sont les citations que j'extrais de mes lectures, ce sont mes pépites!
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Les  citations sérieuses du docteur Chabry
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5 septembre 2016

Où se perdent les hommes

 

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mort, prison, cimetière

" Je suis monté dans ma voiture et, avant de mettre le contact, j'ai longtemps observé cette forteresse de béton où le printemps parviendrait à pénétrer par quelques brins d'herbe ou un bouquet de pâquerettes. En trois ans je n'ai jamais pu m'élancer directement sur l'autoroute, il faut que je reste là un moment, comme recueilli sous cette falaise grise derrière laquelle huit cent hommes regardent vers le ciel tourner les saisons. Depuis mon enfance, je peux bien l'avouer, l'endroit au monde qui me hante le plus est la prison, elle m'attire et me terrorise; du plus loin que je me souvienne j'ai associé ce mot à ceux de caveau, cercueil et cimetière. C'est sans doute pour cela que j'ai demandé d'y travailler, je pensais que de franchir ces murs une fois par semaine me permettrait de les apprivoiser, j'aimerais dire de les "corrompre". Aujourd'hui je sais qu'il n'en est rien, on n'apprivoise pas la mort."

" Y a-t-il une vie avant la mort ? "Depuis que j'ai vu cette phrase en arrivant ce matin, pas une seconde je n'ai cessé de la tourner et retourner dans ma tête, elle me donne le vertige... Quand j'étais petit en Corse, chaque nuit je  pensais à l'infini jusqu'à ce que je me mette à crier. C'est cette sensation que j'ai retrouvé ce matin."

" Oui, je revois exactement la main et le visage de Bove. Ils appartiennent à quelqu'un de mort, à quelqu'un en tout cas qui depuis longtemps n'est plus avec nous. Cela m'avait frappé la première fois que je l'avais vu arriver à l'atelier d'écriture, si pâle en ces premiers jours de printemps, où tous les détenus descendent dans les cours pour sentir sur leur visage les doigts du soleil. Un seul mot avait traversé mon esprit : "transparent". J'avais ressenti le choc de celui qui voit entrer un mort-vivant."

frère, jumeaux

"  - Georges, j'ai besoin de tes conseils pour un masque...il faut que je fasse faire un masque qui soit la copie exacte de mon visage - Qu'est-ce que c'est cette histoire de fous à deux heures du matin ? - Écoutes moi bien Georges c'est une question de vie ou de mort... - Passe à la maison, ça me laisse deux jours pour tout réunir...- Tu peux pas savoir comme je suis...Au fait j'ai du réveiller Boule ?- Nous sommes séparés depuis quelques mois - Et les jumeaux  ? - On se les partage. -Un chacun ? -Mais non enfin, des jumeaux ! Tu pars vraiment en biberine ! On les garde chacun son tour. Bon écoute, je ne vais pas te raconter ma vie à poil au milieu de la nuit. Viens dimanche avec ton histoire de fous. Ça , c'est la meilleure, pendant un an je ne te vois pas et, brusquement, tu viens chercher un deuxième visage ! En parlant de jumeaux je me demande si vous n'étiez pas deux à la naissance, tu devrais te renseigner, depuis que je te connais tu as toujours l'air de chercher de ton frère."

détenus, détention

" Y a-t-il une grande différence entre nos vies, je veux parler de celle des détenus et de la mienne ? Je dors seul, je prends mes repas seul, aucune brillante carrière ne m'attend. Que me manque t-il pour être comme eux ? Un peu de courage physique ? Les murs de la prison je les porte en moi depuis toujours, et lorsque je descends dans la ville boire un café, acheter le journal ou marcher sans fin dans les rues, je n'existe pas plus pour les autres que si j'étais englouti dans le plus lointain cachot."

"La détention est un univers si lointain qu'il pourrait être au fond des plus noirs océans."

" Tous les gardiens fuient ce bâtiment où souffle la colère. Les tentatives d'évasion, les suicides, les émeutes, c'est eux. Certains deviendront célèbres dans l'univers ducrime; c'est leur plus grand désir. Quand ils ne peuvent pas scier leur barreau, ils aiguisent leur cruauté. Mais au fond de leur cellule lorsque la nuit recouvre la prison chacun d'eux pleure doucement en pensant à sa mère."

passion, crime, souffrance

" Elle m'a dit qu'il avait peu bénéficié des circonstances atténuantes que l'on accorde souvent aux crimes passionnels. J'ai trouvé la peine très lourde. Qui peut bien décider où commence et où s'arrête une passion ? Et la passion de l'argent n'en est-ce pas une ? Le soir même j'ai cherché dans le Petit Robert. Passion vient du latin passio qui veut dire "souffrance". Pour les jurés cet homme a assassiné sa femme sans souffrir. Depuis je l'observe encore plus minutieusement, j'ai l'impression que de nous tous c'est lui qui souffre le plus."

 mystère, humanité

" Depuis que j'ai rencontré Bove il m'obsède. J'ai l'impression qu'avec lui je m'approche d'un mystère que je suis sur le point de percer. Lequel ? Je ne sais pas encore, mais son crime et son tourment sont d'une telle richesse que je me demande parfois si toute l'humanité n'est pas là."

conscience

" Je suis de plus en plus convaincu que j'ai raison de vouloir à tout prix le tirer de là. Seul, sans répit, avec ce fantôme au visage d'ombre, il mourra. Il faut qu'il voie autre chose que sa faute, autre chose que des barreaux. Il faut que l'on parvienne à le distraire de sa conscience."

yeux, mort

" Alors j'ai frappé, frappé, frappé, jusqu'à ce que je comprenne que je venais de crever le soleil. Il s'écoulait sur moi, visqueux et rouge comme un oeuf...Longtemps, penché sur lui, j'ai regardé les yeux de cet homme que j'avais voulu sauver. Je n'y ai trouvé rien de plus que ce que j'avais vu pendant des mois derrière les barreaux. C'étaient les yeux d'un mort. Je venais de tuer un mort.

 

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